vendredi 22 décembre 2017

PROJET DE LOI DE FINANCE 2018

PLF 2018 : les modifications adoptées par l’Assemblée Nationale (Adoption en dernière lecture AN 15/12/2017)

Dernière mise à jour le 21 décembre 2017

Certaines modalités d’imposition à l’IFI ont été modifiées (démembrement, tontine, location meublée) et des précisions ont été apportées concernant la "flat tax" et le CITE.

1. Ce qu'il faut retenir

Voici les principales modifications issues de l'adoption en lecture définitive par l'Assemblée Nationale :

1.1. IFI (article 12 du projet)

L’Assemblée Nationale a confirmé le dispositif IFI. Cependant, certaines dispositions sont modifiées.

1.1.1. Démembrement

Lorsque le conjoint survivant opte pour son droit d’usufruit légal et pour les décès intervenus à compter du 1er janvier 2018, l’imposition à l’IFI est répartie entre l’usufruitier et le nu-propriétaire conformément à l’article 669 du CGI. Il en est de même pour les décès intervenus avant le 1er juillet 2002 (article 767 de Code civil) : chacun paie l’IFI sur la valeur de son droit.
Cependant, pour  les décès intervenus entre le 1er juillet 2002 (article 757 du Code civil) et le 31 décembre 2017, l’usufruitier reste taxable sur la pleine propriété (contrairement à la rédaction antérieure).
Remarque : 
Les nouvelles modalités d’imposition des démembrements issus de l’article 757 du Code civil s'appliquent aux seuls démembrements "opérés" à compter du 1er janvier 2018, c’est-à-dire, à notre sens et compte tenu du caractère rétroactif de l’option du conjoint survivant au jour du décès, pour les décès intervenus à compter du 1er janvier 2018.

1.1.2. Acquisition en tontine

Les actifs imposables (biens, droits réels immobiliers ou titres de sociétés détenant des immeubles) acquis en tontine sont imposables pour chaque tontinier, proportionnellement aux sommes investies. 
Remarque : 
Les tontines financières (assurance) étant des contrats non rachetables au sens du nouvel article 972 du CGI, elles ne sont pas imposables à l’IFI y compris lorsqu’elles sont investies en unités de compte contenant des biens ou droits immobiliers.

1.1.3. Contrats et bons de capitalisation

Le texte précise que, outre les unités de compte détenues au sein de contrats d’assurance-vie, sont également imposables les unités de compte souscrites dans le cadre de bons ou contrats de capitalisation à proportion de la valeur des actifs immobiliers.

1.1.4. Location meublée

Les loueurs en meublé en direct sont exonérés au titre des biens professionnels sous 3 conditions cumulatives : 
  • ils réalisent plus de 23 000 € de recettes annuelles de cette activité ;
  • cette activité représente plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires (hors pension de retraite), bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 ;
  • et si l’activité constitue leur activité professionnelle principale.
La condition d’inscription au RCS n’apparait plus dans le texte et est remplacée par la notion d’activité professionnelle principale.

En cas de détention au travers une société (IR ou IS), seul l'exercice de l'activité principale ou des fonctions de direction est nécessaire (à l'exclusion de la condition de recettes de 23 000 €).
Remarque : 
De manière identique, les locations équipées sont exonérées au titre des biens professionnels dès lors que l’activité constitue l'activité principale du contribuable (exercice en direct ou au travers d’une société soumise à l’IR) ou si le contribuable remplit certaines fonctions de direction (société à l’IS).

1.1.5. Déduction des prêts in fine

Un mécanisme d’amortissement forfaitaire d’1/20ème est appliqué pour les prêts in fine ne prévoyant aucun terme pour le remboursement du capital.
Exemple : 
Crédit in fine d'un montant de 100 000 €
Amortissement fictif : 100 000 / 20 = 5 000 €
  • Montant déductible après 1 année écoulée : 100 000 € - (100 000 x 1 / 20) = 95 000 €
  • Montant déductible après 2 années écoulées: 100 000 € -  (100 000 x 2 / 20) = 90 000 €
  • Etc. 

1.1.6. Valorisation des titres de sociétés et dettes déductibles

La définition des dettes déductibles est aménagée : 
  • les dettes contractées par la société auprès du redevable ou auprès d’une société qu’il contrôle sont déductibles pour la valorisation des titres de la société à condition que le contribuable justifie que le prêt n’a pas été contracté dans un but principalement fiscal (il n’a finalement pas besoin de justifier de condition normal de prêt) ;
  • de même, le contribuable peut écarter la limitation de la déduction des dettes au-delà de 5 millions d’euros d’actif imposable s’il justifie d’un but non principalement fiscal (dans la rédaction antérieure, le contribuable n'avait pas la possibilité d'écarter cette limitation) ;
  • concernant la non déduction des dettes contractées suite à une vente a soi-même (vente d’un bien ou droit immobilier par le redevable à une société), il est précisé que la non-déductibilité s’applique lorsque le contribuable contrôle la société cessionnaire, seul ou conjointement avec les membres du foyer.

1.1.7. Exonération des SIIC

Les actions de sociétés d’investissements immobiliers cotées (SIIC) ne sont pas imposables lorsque le contribuable détient, directement ou indirectement, seul ou conjointement avec les membres de son foyer IFI  moins de 5 % du capital social et des droits de vote de la société.
(nouvel article 972 ter du CGI)

1.2. Revenus du capital et PFU – Flat tax (article 11 du projet)

Concernant la taxation des produits des contrats (et bons) d’assurance-vie ou de capitalisation afférents aux primes versées à compter du 27 septembre 2017, plusieurs précisions sont apportées : 
  • la "flat tax" s’applique tant aux contrats souscrits en France qu’à l’étranger, 
  • la limite de 150 000 € s’apprécie par titulaire et non par assuré. 
Remarque : 
La notion de titulaire s’applique plus aisément aux contrats de capitalisation qui, par définition, n’ont pas d’assuré :
  • en cas de démembrement, les primes versées sont prises en compte uniquement pour la détermination du seuil applicable à l’usufruitier, 
  • cependant, rien n’est précisé pour le cas d’une  en cas de co-souscription ; doit-on  tenir compte des versements effectués respectivement par chacun des co-souscripteurs ? 

D'autre part, pour l'appréciation des 150 000 € il est tenu compte des bons et contrats dont est titulaire le bénéficiaire de produits : cette rédaction peut amener, en cas de rachat réalisé par une société soumise à l'IR, à déterminer le "bénéficiaire effectif " des produits, c'est-à-dire l'associé. Dans ces circonstances, il pourrait être nécessaire de prendre en compte l'ensemble des contrats et bons dont l'associé est titulaire pour déterminer la fiscalité applicable aux rachats effectués par la société à l'IR sur son contrat.

On sera attentif aux commentaires apportés par le BOFiP sur ces différentes questions.
Par ailleurs, les bons de souscriptions de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) cédés par un contribuable qui exerce son activité dans la société depuis au moins 3 ans restent soumis à une taxation à 30 %.
La rédaction antérieure reste inchangée pour les autres contribuables : le gain d’exercice est imposé selon les règles de droit commun des salaires (barème progressif) et le gain de cession est imposé à la "flat tax".
Attention :
La suppression de la "flat tax" et l'imposition au barème progressif des dividendes supérieurs à 10 % du capital social perçus par les salariés dirigeants et cadres n’a pas été retenue.

De même, la possibilité de cumuler l’abattement de 500 000 € pour départ à la retraite et des abattements renforcés pour durée de détention n’a pas été validée par l’Assemblée Nationale.

1.3. CITE (article 39 nonies du projet)

Les amendements du Sénat concernant le CITE n’ont pas été retenus : le texte a été adopté dans sa rédaction du 21 novembre par l’Assemblée Nationale (voir notre tableau).

Seule une disposition est ajoutée : le montant des dépenses d’acquisition de pompes à chaleur dédiées à la production d’eau chaude sanitaire (chauffe-eaux thermodynamiques) retenu pour le crédit d’impôt est plafonné (montant à déterminer par décret).
Les autres pompes à chaleur ne sont pas concernées (notamment les pompes à chaleur géothermiques).

1.4. Réduction Madelin (IR-PME) (article 39 sexies du projet)

Les frais perçus par les intermédiaires financiers pour la souscription au capital de PME, FIP et FCPI sont plafonnés (montant à fixer par arrêté). A défaut, une amende égale à 10 fois le montant des frais indûment perçus sera due.

Par exception, les frais et commissions peuvent, dans certaines circonstances exceptionnelles, excéder ce plafond, lorsque le dépassement correspond en totalité à des frais engagés pour faire face à une situation non prévisible indépendante de la volonté des gérants et dans l’intérêt des investisseurs ou porteurs de parts.
Remarque : 
Pour rappel, la base de la réduction d’IR est constituée des versements effectués, déduction faite des frais et commissions prélevés par le tiers mandaté.

1.5. Réduction d’IR pour dons aux fondations d’entreprises (article 39 octies C du projet)

Les dons et versements effectués en faveur de fondations d’entreprises (poursuivant un but d’intérêt général) ouvrent droit une réduction de 66 % sur l’IR lorsqu’ils sont versés par les salariés des entreprises fondatrices ou des entreprises du groupe auquel appartient l’entreprise fondatrice de la fondation.

Les versements éligibles sont étendus aux dons réalisés par les mandataires sociaux, sociétaires, actionnaires et adhérents de ces entreprises aux fondations d’entreprises qui en dépendent. Ces dons restent toutefois retenus dans la limite de 1 500 €.

1.6. TVA sur logements sociaux (article 6 ter A du projet)

Les opérations réalisées dans le cadre de la politique sociale du logement bénéficient du taux réduit de TVA à 5,5 %.

A compter du 1er janvier 2018, ce taux est porté à 10 % sauf exception (notamment restent soumis au taux de 5,5 % les travaux de rénovation énergétique, les opérations afférentes aux logements locatifs médico-sociaux et les opérations afférentes aux dispositifs d’accession à la propriété).



Projet de loi de Finances pour 2018 - lecture définitive

2. Conséquences pratiques

2.1. IFI et démembrement

Au point de vue de la sécurité juridique, il est heureux que les démembrements issus de l’article 767 et 757 du Code civil continuent, pour le premier, de bénéficier de l’imposition au prorata de l’article 669 du CGI et pour le second, d’imposer l’usufruitier  sur la pleine propriété.

En résumé, seuls les démembrements futurs seront impactés par la transformation de l’ISF en IFI.
Origine du démembrementISF (avant 2018)IFI (à compter de 2018)
Ancien usufruit légal (ancien art 767 du CGI) - Décès antérieurs au 1er juillet 2002Imposition au prorata de l’article 669 du CGI
Nouvel usufruit légal (art. 757 du CGI) - Décès après le 1er juillet 2002Imposition de la pleine propriété chez l’usufruitier Décès avant le 1er janvier 2018  : imposition de la pleine propriété chez l’usufruitierDécès à compter du 1er janvier 2018 : imposition au prorata de l’article 669 du CGI
Usufruit conventionnel (donation entre époux)Imposition de la pleine propriété chez l’usufruitier

2.2. IFI et location meublée

L’exonération des loueurs en meublée n'est, finalement, pas conditionnée à l’inscription du loueur au RCS en qualité de loueur meublé professionnel (comme cela était prévue dans la rédaction initial de l’IFI et pour l’ISF).

Cette définition est, a priori, plus favorable aux LMNP (à condition que l’activité constitue leur activité principale, ce qui est rarement le cas) mais pénalisante pour les LMP exerçant en direct qui devront remplir une condition supplémentaire par rapport à l’ISF, celle d’activité professionnelle principale.